Шодерло де Лакло Пьер - Опасные связи / Les liaisons dangereuses. Книга для чтения на французском языке стр 2.

Шрифт
Фон

Mais, en partant encore de cette supposition favorable, il me semble toujours que ce recueil doit plaire à peu de monde. Les hommes et les femmes dépravés auront intérêt à décrier un ouvrage qui peut leur nuire, et comme ils ne manquent pas dadresse, peut-être auront-ils celle de mettre dans leur parti les rigoristes, alarmés par le tableau des mauvaises mœurs quon na pas craint de présenter.

Les prétendus esprits forts ne sintéresseront point à une femme dévote, que par cela même ils regarderont comme une femmelette, tandis que les dévots se fâcheront de voir succomber la vertu et se plaindront que la Religion se montre avec trop peu de puissance.

Dun autre côté, les personnes dun goût délicat seront dégoûtées par le style trop simple et trop fautif de plusieurs de ces lettres ; tandis que le commun des Lecteurs, séduit par lidée que tout ce qui est imprimé est le fruit dun travail, croira voir dans quelques autres la manière peinée dun auteur qui se montre derrière le personnage quil fait parler.

Enfin on dira peut-être assez généralement, que chaque chose ne vaut quà sa place, et que si dordinaire le style trop châtié des auteurs ôte en effet de la grâce aux lettres de société, les négligences de celles-ci deviennent de véritables fautes, et les rendent insupportables quand on les livre à limpression.

Javoue avec sincérité que tous ces reproches peuvent être fondés : je crois aussi quil me serait possible dy répondre, et même sans excéder la longueur dune préface ; mais on doit sentir que pour quil fût nécessaire de répondre à tout, il faudrait que louvrage ne pût répondre à rien; et que si jen avais jugé ainsi, jaurais supprimé à la fois la préface et le livre.

Lettre Première. Cécile Volanges à Sophie Carnay

aux Ursulines de

Tu vois, ma bonne amie, que je te tiens parole, et que les bonnets et les pompons ne prennent pas tout mon temps ; il men restera toujours pour toi. Jai pourtant vu plus de parures dans cette seule journée que dans les quatre ans que nous avons passés ensemble, et je crois que la superbe Tanville[2] aura plus de chagrin à ma première visite, où je compte bien la demander, quelle na cru nous en faire toutes les fois quelle est venue nous voir in fiocchi. Maman ma consultée sur tout ; et elle me traite beaucoup moins en pensionnaire que par le passé. Jai une femme de chambre à moi ; jai une chambre et un cabinet dont je dispose, et je técris à un secrétaire très joli, dont on ma remis la clef, et où je peux renfermer tout ce que je veux. Maman ma dit que je la verrais tous les jours à son lever ; quil suffisait que je fusse coiffée pour dîner, parce que nous serions toujours seules, et qualors elle me dirait chaque jour lheure où je devrais laller joindre laprès-midi. Le reste du temps est à ma disposition, et jai ma harpe, mon dessin, et des livres comme au couvent ; si ce nest que la Mère Perpétue nest pas là pour me gronder, et quil ne tiendrait quà moi dêtre toujours sans rien faire : mais comme je nai pas ma Sophie pour causer et pour rire, jaime autant moccuper.

Il nest pas encore cinq heures ; je ne dois aller retrouver Maman quà sept ; voilà bien du temps, si javais quelque chose à te dire ! Mais on ne ma encore parlé de rien ; et sans les apprêts que je vois faire, et la quantité douvrières qui viennent toutes pour moi, je croirais quon ne songe pas à me marier, et que cest un radotage de plus de la bonne Joséphine[3]. Cependant Maman ma dit si souvent quune demoiselle devait rester au couvent jusquà ce quelle se mariât, que puisquelle men fait sortir, il faut bien que Joséphine ait raison.

Il vient darrêter un carrosse à la porte, et Maman me fait dire de passer chez elle, tout de suite. Si cétait le Monsieur ? Je ne suis pas habillée, la main me tremble et le cœur me bat. Jai demandé à la femme de chambre, si elle savait qui était chez ma mère : « Vraiment, ma-t-elle dit, cest M. C***. » Et elle riait. Oh ! je crois que cest lui. Je reviendrai sûrement te raconter ce qui se sera passé. Voilà toujours son nom. Il ne faut pas se faire attendre. Adieu, jusquà un petit moment.

Comme tu vas te moquer de la pauvre Cécile ! Oh ! jai été bien honteuse ! Mais tu y aurais été attrapée comme moi. En entrant chez Maman, jai vu un Monsieur en noir, debout auprès delle. Je lai salué du mieux que jai pu, et suis restée sans pouvoir bouger de ma place. Tu juges combien je lexaminais ! « Madame », a-t-il dit à ma mère, en me saluant, « voilà une charmante demoiselle, et je sens mieux que jamais le prix de vos bontés. » À ce propos si positif, il ma pris un tremblement tel, que je ne pouvais me soutenir ; jai trouvé un fauteuil, et je my suis assise, bien rouge et bien déconcertée. Jy étais à peine, que voilà cet homme à mes genoux. Ta pauvre Cécile alors a perdu la tête ; jétais, comme a dit Maman, tout effarouchée. Je me suis levée en jetant un cri perçant ; tiens, comme ce jour du tonnerre. Maman est partie dun éclat de rire, en me disant : « Eh bien ! quavez-vous ? Asseyez-vous, et donnez votre pied à Monsieur. » En effet, ma chère amie, le Monsieur était un cordonnier : je ne peux te rendre combien jai été honteuse ; par bonheur il ny avait que Maman. Je crois que quand je serai mariée, je ne me servirai plus de ce cordonnier-là.

Conviens que nous voilà bien savantes ! Adieu. Il est près de six heures, ma femme de chambre dit quil faut que je mhabille. Adieu, ma chère Sophie ; je taime comme si jétais encore au couvent.

P. S. Je ne sais par qui envoyer ma lettre : ainsi jattendrai que Joséphine vienne.

Paris, ce 3 août 17**.

Lettre II. La Marquise de Merteuil au Vicomte de Valmont

Au château de

Revenez, mon cher Vicomte, revenez : que faites-vous, que pouvez-vous faire chez une vieille tante dont tous les biens vous sont substitués ? Partez sur-le-champ ! jai besoin de vous. Il mest venu une excellente idée, et je veux bien vous en confier lexécution. Ce peu de mots devrait suffire ; et, trop honoré de mon choix, vous devriez venir, avec empressement, prendre mes ordres à genoux : mais vous abusez de mes bontés, même depuis que vous nen usez plus ; et dans lalternative dune haine éternelle ou dune excessive indulgence, votre bonheur veut que ma bonté lemporte. Je veux donc bien vous instruire de mes projets : mais jurez-moi quen fidèle Chevalier, vous ne courrez aucune aventure que vous nayez mis celle-ci à fin. Elle est digne dun héros : vous servirez lamour et la vengeance ; ce sera enfin une rouerie[4] de plus à mettre dans vos Mémoires : oui, dans vos Mémoires, car je veux quils soient imprimés un jour, et je me charge de les écrire. Mais laissons cela, et revenons à ce qui moccupe.

Madame de Volanges marie sa fille : cest encore un secret ! mais elle men a fait part hier. Et qui croyez-vous quelle ait choisi pour gendre ? le Comte de Gercourt. Qui maurait dit que je deviendrais la cousine de Gercourt ? Jen suis dans une fureur ! Eh bien ! vous ne devinez pas encore ? oh ! lesprit lourd ! Lui avez-vous donc pardonné laventure de lIntendante ? Et moi, nai-je pas encore plus à me plaindre de lui, monstre que vous êtes[5] ?

Mais je mapaise, et lespoir de me venger rassérène mon âme.

Vous avez été ennuyé cent fois, ainsi que moi, de limportance que met Gercourt à la femme quil aura, et de la sotte présomption qui lui fait croire quil évitera le sort inévitable. Vous connaissez sa ridicule prévention pour les éducations cloîtrées et son préjugé plus ridicule encore, en faveur de la retenue des blondes. En effet, je gagerais que, malgré les soixante mille livres de rente de la petite Volanges, il naurait jamais fait ce mariage, si elle eût été brune, ou si elle neût pas été au couvent. Prouvons-lui donc quil nest quun sot ; il le sera sans doute un jour ; ce nest pas là ce qui membarrasse : mais le plaisant serait quil débutât par là. Comme nous nous amuserions le lendemain en lentendant se vanter ! car il se vantera ; et puis, si une fois vous formez cette petite fille, il y aura bien du malheur si le Gercourt ne devient pas, comme un autre, la fable de Paris.

Ваша оценка очень важна

0
Шрифт
Фон

Помогите Вашим друзьям узнать о библиотеке

Скачать книгу

Если нет возможности читать онлайн, скачайте книгу файлом для электронной книжки и читайте офлайн.

fb2.zip txt txt.zip rtf.zip a4.pdf a6.pdf mobi.prc epub ios.epub fb3