Various - Choix de contes et nouvelles traduits du chinois стр 4.

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D'ordinaire, les plantes touffues et les arbres épais sont la retraite des animaux et les oiseaux y font leurs nids: aussi dans ce lieu, rempli à la fois de fleurs et de fruits, ils se trouvaient en bien plus grand nombre encore. Tant qu'ils se bornaient à manger les fruits, c'était peu de chose; mais s'ils se laissaient aller à becqueter et à endommager les fleurs, Tsieou-Sien arrivait avec du millet et du grain qu'il plaçait dans un endroit bien net, afin que ces animaux le mangeassent; il leur adressait des prières dont ces êtres privés de raison comprenaient clairement le sens: chaque jour bien repus, ils abaissaient leur vol et sautillaient délicatement parmi les fleurs, et sans plus jamais becqueter une seule baie, ils chantaient d'une voix flexible et harmonieuse.

Les fruits étant aussi respectés, le verger en contenait une foule d'espèces d'un volume, d'un goût et d'une beauté remarquables. A l'époque de la maturité, Tsieou faisait d'abord une offrande au génie des fleurs, n'osant toucher qu'après cette oblation aux productions de son jardin; puis il envoyait à la ronde à tous ses voisins les prémices de sa récolte. Le surplus était confit, et c'était là son revenu de chaque année.

Comme il avait goûté le charme des fleurs, Tsieou-Sien, malgré ses cinquante ans, ne ressentait ni fatigue ni affaiblissement, il était au contraire bien portant, robuste et alerte. Vêtu d'habits très simples, usant d'une nourriture frugale, il vivait dans l'aisance et dans le contentement de son sort, possédait encore du superflu et savait venir au secours des pauvres du village. Aussi il n'y avait personne dans le voisinage qui ne lui témoignât du respect; on l'appelait Monsieur Tsieou7, et lui-même se désignait par le nom du Vieillard qui arrose son jardin (Kouan-Youen-Seou).

Les vers disent:

Le matin, il arrosait son jardin, le soir il l'arrosait encore,
A force de soins, il y fit éclore cent plantes rares et précieuses;
Quand elles étaient fleuries, il ne pouvait en rassasier ses
regards,
Et il tenait tant à son parterre, qu'il aimait mieux le contempler
à loisir que d'aller prendre du repos.

Ici l'histoire se divise.  Dans la ville de Ping-Kiang, dont ce village de Tchang-Yo était voisin, vivait un jeune homme d'une famille de mandarins, appelé Tchang-Oey. C'était un individu corrompu, astucieux, cruel, tyrannique et arrogant. Plein de confiance dans l'influence de sa famille, il s'occupait uniquement à opprimer ses voisins, à les épouvanter par ses violences, et à vexer les gens de bien sous divers prétextes; et quand une fois il avait entrepris quelqu'un, il lui suscitait jusqu'au bout de dangereuses affaires, se faisant un jeu de le ruiner de fond en comble: alors seulement il lâchait sa victime. Une troupe de valets, d'esclaves, vrais loups, vrais tigres, accomplissait ses volontés. Beaucoup d'autres vauriens aussi, sans être sous la dépendance de Tchang-Oey, restaient nuit et jour dans sa compagnie, formant ainsi une troupe occupée à chercher en tous lieux l'occasion de nuire et à faire naître les désastres sur ses pas. Combien de personnes avaient eu à souffrir de leur despotisme!

Or, contre toute attente, il se trouva un personnage pire encore, qui n'eut pas de peine à saisir et à battre vertement ce méchant homme. Tchang-Oey alla porter plainte devant les tribunaux, mais son adversaire fit tant de ses pieds et de ses mains, qu'il le déjoua et porta même une plainte contre lui. Alors, pour dissimuler sa honte et son affront, Tchang emmena avec lui cinq ou six domestiques de sa maison et une bande de mauvais sujets, avec lesquels il s'en alla à la campagne passer son chagrin. Or, cette maison de plaisance se trouvait précisément située au village de Chang-Yo, non loin de la demeure du vieux Tsieou-Sien.

Un jour donc après le déjeuner, et ils avaient bu au point d'être à moitié ivres, Tchang-Oey et les siens firent par hasard une promenade dans le village, et ne tardèrent pas à se trouver en face du jardin de Tsieou-Sien. Ils aperçoivent par-dessus la haie des fleurs brillantes qui réjouissent le regard; tout autour sont des arbres répandant un épais ombrage. D'une voix unanime ils demandent à qui appartient ce jardin si frais et si élégant: un domestique leur répond que ces plantations font partie de l'enclos de Monsieur Tsieou, celui-là même que l'on appelle le Fou des fleurs. En effet, ajouta Tchang-Oey, j'ai entendu dire qu'il y a dans les environs de ma maison de campagne une personne de ce nom, un certain Tsieou qui possède une collection de plantes rares et de belles fleurs; puisque c'est là sa demeure, que n'entrons-nous? C'est que, interrompt le domestique, mon maître est un peu bizarre; il ne permet guère que l'on voie son jardin. Pour tout autre, c'est possible, reprend Tchang-Oey, mais pour moi, cette défense peut-elle avoir lieu? Et aussitôt il pousse la porte.

A cette époque les pivoines étaient en pleine fleur. Tsieou avait à peine fini d'arroser; assis dans le parterre, avec une cruche de vin et deux plats couverts de fruits, il commençait à remplir son verre; il n'avait pas eu le temps de le vider trois fois depuis qu'il se livrait à cet innocent plaisir, lorsque le bruit des portes roulant sur leurs gonds frappa son oreille: il laisse là son vin, court vers la porte, regarde et voit cinq ou six personnes debout devant lui. La fumée du vin monte au cerveau de Tsieou; il s'imagine que ce sont en effet des curieux qui sont venus pour voir son jardin, mais les arrêtant à la porte, il leur adresse cette question: Que demandent ces Messieurs? Ne savez-vous pas qui je suis, vieillard? répond Tchang; je suis connu dans la ville sous le nom de Tchang-Yâ-Nouy (Tchang de l'intérieur du palais). La maison de campagne qui est ici près, et qu'on appelle Tchang-Kia, appartient à ma famille; j'ai appris que vous possédez une multitude de belles fleurs, et je viens tout exprès pour les admirer. J'observerai à sa Seigneurie, répliqua le vieillard, que je n'ai rien de curieux maintenant: ce sont des pêchers, des abricotiers que vous voyez ici, et rien de plus; tout est fané; il n'y a plus rien du tout que cela.

Tchang-Oey se mit à regarder de travers le vieux jardinier, et s'écria: Qu'a-t-il donc, ce vieillard? y a-t-il un si grand mal à regarder des fleurs? vous me répondez qu'il n y a plus rien: est-ce que je veux vous les manger? Non vraiment, reprit encore Tsieou-Sien, le vieux Chinois n'en impose point à votre Seigneurie: en vérité, tout est fini.

Tchang-Oey n'était pas homme à écouter tout cela. Il s'avance donc, ouvre brusquement les bras, et pousse au milieu de la poitrine le vieillard, qui, assez peu solide sur ses pieds, chancelle, trébuche, est jeté à l'écart; et toute sa bande entre tumultueusement. Le pauvre jardinier voit qu'il a affaire à des vauriens abusant de leur force, et il est contraint de leur livrer passage. Puis il ferme la porte de l'enclos, va chercher le vin et les fruits qu'il a laissés à terre, et se tient auprès des jeunes gens, les accompagnant dans leur promenade.

Or, parmi les plantes nombreuses du jardin, les pivoines seules étaient épanouies. On compte cinq espèces remarquables de cette fleur qui est la reine des parterres; ce sont: l'étage d'or, le papillon vert, la richesse du melon d'eau, le lion bleu scintillant, et la tête du grand lion rouge. Mais la ville de Lo-Yang, dans le Ho-Nan, fut la première de l'empire qui posséda la belle variété nommée Yao-Hoang-Kouey (l'Elégant génie doré) dont un seul pied vaut mille des autres.

Peut-être demanderez-vous pourquoi cette ville eut ce privilège? Ecoutez: sous la dynastie des Tang, vivait la reine Wou-Sse-Tien, princesse d'une conduite fort irrégulière. La fantaisie lui prit d'aller se promener pendant l'hiver dans le parc, derrière le palais, et elle écrivit les quatre vers suivants:

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