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Оноре де Бальзак
Озорные рассказы / Les contes drolatiques. Уровень 1
© Потокина А. М., подготовка текста, комментарии, упражнения, словарь, 2023
© ООО «Издательство АСТ», 2023
La première dizaine
La belle Impéria
Larchevêque de Bordeaux avait mis[1] de sa suite, pour aller au Concile de Constance, un tout joli petit prêtre, dont la façon de parler était très mignon.
Notre prêtre sappelait Phillipe de Mala. Il se résolut[2] à servir dignement son promoteur. Mais il a vu à ce Conseil beaucoup de gens menant une vie dissolue et nen gagnant pas moins[3], et même plus dindulgence et décus dor que tous les autres qui étaient sages.
Ainsi, pendant une nuit le diable souffla à loreille du prêtre quil ne devait pas se limiter, puisque chacun pouvait bénéficier de la Sainte Eglise, cétait un miracle qui prouvait bien la présence de Dieu. Le prêtre crut[4] le diable. Il se promit de banqueter. Il sintéressait avant tout aux femmes.
Le secrétaire dévêque raconta au prêtre que les pères et les procureurs donnait aux femmes des pierres et de lor. Le pauvre prêtre de Tours commença à amasser des monnaies, qui lui donnait larchevêque pour son travail décriture, en espérant, un jour, en avoir suffisamment pour voir la courtisane dun cardinal.
Le petit gentil Philippe attrapa souvent de bons coups,[5] mais le diable le soutint en lui faisant croire que, tôt ou tard, ça serait son tour dêtre chez la femme dun cardinal.
Un soir il se glissa dans la plus belle maison de Constance.
Ah, se dit-il, elle doit être belle et galante, celle-là!
Phillipe de Mala monta rapidement les escaliers et resta à la porte de la chambre de la maitresse comme un voleur devant les juges. Les servantes, occupées à déshabiller la maitresse, mirent son joli corps à nu, et en le voyant, le prêtre sexclama «Ah!».
Et que voulez-vous, mon petit? lui dit la
dame.
Vous rendez mon âme, fit-il en la mangeant des yeux.
Vous pouvez revenir demain, reprit-elle pour se moquer de lui.
A quoi Philippe répondit:
Jen serait honoré.[6]
Elle se mit à rire[7] comme une folle. Philippe resta confus et heureux.
Il a de beaux yeux, madame! dit une des servantes.
Doù sort-il donc? demanda lautre.
Pauvre enfant! sécria Madame, sa mère le cherche.
Mais le regard de prêtre plein damour réveilla limagination de la dame, et moitié riante, moitié férue[8] elle lui répéta «Demain!» et le renvoya par un geste.
Le lendemain Philippe traversa la ville pour retrouver la maison de la reine de son cœur. Quand il demanda aux passants à qui appartenait la maison, ils rirent de lui et dirent: «Doù vient ce galeux qui na entendu parler de la belle Impéria?»
En entendant le nom Impéria, il eut peur. Imperia était la plus précieuse et fantasque du monde. Sans manger ni boire, il se promenait en ville, en attendant lheure.
La nuit vint. Le prêtre de Tours se glissa dans une maison de la véritable reine du Conseil.
Impéria était assise près de la table avec les meilleures boissons.
Elle dit:
Mettez-vous près de moi, pour que je voie si vous êtes changé dhier.
Oh oui! fit-il. Hier, je vous aimais!.. Et ce soir, nous nous aimons.
Oh! petit! petit! sescria-t-elle joyeusement, oui, tu as changé, car de jeune prêtre tu es devenu le vieux diable.
Comme ils se furent enfin commodément établis, il se fit un bruit désagréable, comme si les gens se battaient en criant. Le gros évêque de Coire entra tout poussif de colère.[9] Il volait chasser le jeune prêtre, mais Impéria larrêta.
Asseyez-vous et buvez, dit-elle.
Philippe était en colère. Le diner continuait, mais le jeune prêtre ne mangea rien.
Soudain le cardinal de Raguse entra dans la salle. Il comprit tout du premier coup[10].
Hé! mon ami, fit-il à Philippe en lappelant à lui.
Ils sortirent dans lescalier.
Choisis! dit le cardinal, de te marier avec une abbaye pour la vie, ou avec Madame, ce soir, pour en mourir demain
Ah! fit le prêtre, une bonne grosse abbaye
Le cardinal rentra dans la salle, trouva un bout de papier et y écrivit une cédule pour lenvoyé de France.
Monsieur, lui dit le prêtre de Tours, Lévêque de Coire ne sen ira pas aussi vite que moi. Il a trop bu. Mais jai une idée. Vous savez à quel point la coqueluche est mauvaise. Dites à lévêque que vous était chez votre vieil ami malade larchevêque de Bourdeaux
Et le prêtre partit.
Ah! ah! mon bon confrère, dit-il à lévêque, je me félicite dêtre en votre compagnie, et suis contant davoir chassé ce petit prêtre indigne de Madame.
Cest le scribe à monsieur larchevêque de Bourdeaux, et ceci a tombé malade ce matin
Après ces mots lévêque de Coire montra combien les gros hommes sont légers. Il disparut immédiatement.
Le cardinal voulut embrasser Impéria, mais elle ne permit pas.
Vous devenez fou, dit-elle; allez-vous-en!
Je serai pape, et tu me payeras ça[11]
Sortez!
Impéria se trouva seule devant le feu.
Ah! fit-elle en pleurant, comme je suis malheureuse!
Soudains elle vit dans le miroir la figure du prêtre.
Ah! ah! fit-elle, viens, mon gentil, mon fils chéri. Je veux te faire Roi, Empereur, Pape, et plus heureux queux tous!..
Il lui regardait en silence dun regard amoureux. Et elle dit:
Allons! tais-toi, petit!.. Soupons.
Le peche veniel
I
Comment le bonhomme bruin prit une femme
Monsieur Bruin fut fêtard dans sa jeunesse. Enfin il se ruina. Un abbé de Marmoutier, son voisin, lui conseilla daller en Terre Sainte et lutter contre les musulmans pour redevenir riche. Et monsieur Bruin partit en Afrique.
Il retourna de la Croisade chargé décus et des pierres précieuses. En plus, le roi Philippe le nomma comte et sénéchal.
Monsieur Bruin devint sage. Tout le monde laimait.
Un jour, à la veille de la fête de Saint-Jean[12], des Égyptiens ou des Bohémiens pillèrent le monastère de Saint-Martin. Et pour se moquer de la foi chrétienne, ils y laissèrent une fille moricaude toute nue. Elle fut condamnée à brûler[13]. Mais monsieur Bruin prouva que ça serait plaisant au Dieu si cette âme africaine devenait chrétienne. La Moresque nhésita point entre le feu et le baptême. Elle choisit être chrétienne.
Monsieur Bruin proposa Madame dAsai, la femme du chevalier qui était captivé par les Sarrasins, dêtre marraine de la Moresque.
A la fête du baptême monsieur le Bruin vit la fille de Madame dAsai, mademoiselle Blanche, et tomba amoureux delle. Cette fille était naïve. Elle permit monsieur Bruin de baiser sa main, et puis le cou. Une semaine plus tard ils se marièrent.
Après les trois jours de noces monsieur Bruin emmena sa femme dans son château. Ils se mirent au lit. Monsieur Bruin baissa Blanche au front, puis au sein, mais ce fut tout. Sentant, quil ne pouvait rien faire, le compte se recula devant le bord du lit et dit à son épouse:
Et voilà, vous êtes dame.
Oh! non, fit-elle.
Comment, non? répondit-il, nêtes-vous pas dame?
Non, fit-elle encore. Je la serai quand jaurai un enfant!
Oh! ma petite! dit le sénéchal, reconnaissant que Blanche était pucelle de la tête aux pieds, le bon vouloir de Dieu est premièrement nécessaire pour cet office; puis les femmes doivent être en état nécessaire.
Et quand serai-je en état nécessaire? demanda-t-elle.
Lorsque la nature le voudra, dit-il pour rire.
Et que faut-il faire? reprit-elle.
Bah! une opération alchimique pleine de dangers.
Mais cette opération alchimique, ne serait-elle se faire incontinent?
Oh! non! Pour ce nous devons être innocents devant Dieu. Navez-vous pas transgressé les ordonnances de lEglise?
Oh! non, dit-elle vivement.
Vous êtes bien parfaite!.. sécria monsieur Bruin, mais moi, jai juré comme un Païen[14].
Oh! Et pourquoi?
Parce que la dance ne finissait pas, et je voulais vous emmener ici et embrasser.
Elle était fatiguée et elle se coucha en laissant son vieillard admirer sa beauté.