Doyle Arthur Conan - Les Cinq Pépins D'Orange стр 4.

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– Ta-ra-ta-ta! s’écria Sherlock Holmes. Il faut agir, mon brave, ou vous êtes perdu. Du cran! Rien d’autre ne peut vous sauver. Ce n’est pas le moment de désespérer.

– J’ai vu la police.

– Ah!

– Mais ils ont écouté mon histoire en souriant. Je suis convaincu que l’inspecteur est d’avis que les lettres sont de bonnes farces et que la mort des miens fut réellement accidentelle, ainsi que l’ont déclaré les jurys, et qu’elle n’avait rien à voir avec les avertissements.

Holmes agita ses poings en l’air.

– Incroyable imbécillité! s’écria-t-il.

– Ils m’ont cependant donné un agent pour habiter si je veux la maison avec moi.

– Est-il venu avec vous ce soir?

– Non, il a ordre de rester dans la maison.

De nouveau, Holmes, furieux, éleva les poings.

– Pourquoi êtes-vous venu à moi? dit-il. Et surtout pourquoi n’êtes-vous pas venu tout de suite?

– Je ne savais pas. Ce n’est qu’aujourd’hui que j’ai parlé à Prendergast de mes ennuis et qu’il m’a conseillé de m’adresser à vous.

– Il y a deux jours pleins que vous avez reçu la lettre. Nous aurions déjà agi. Vous n’avez pas d’autres renseignements que ceux que vous nous avez fournis, je suppose, aucun détail qui pourrait nous aider?

– Il y a une chose, dit John Openshaw, une seule chose.

Il fouilla dans la poche de son habit et en tira un morceau de papier bleuâtre et décoloré qu’il étala sur la table.

– Je me souviens, dit-il, que le jour où mon oncle a brûlé ses papiers, j’ai remarqué que les petits bouts de marges non brûlés qui se trouvaient dans les cendres avaient tous cette couleur particulière. J’ai trouvé cette unique feuille sur le plancher de sa chambre et tout me porte à croire que c’est peut-être un des papiers qui, ayant volé loin des autres, avait, de la sorte, échappé à la destruction. Sauf qu’il y est question de «pépins», je ne pense pas qu’il puisse nous être d’une grande utilité. Je crois, pour ma part, que c’est une page d’un journal intime. Incontestablement, l’écriture est celle de mon oncle.

Holmes approcha la lampe et tous les deux nous nous penchâmes sur la feuille de papier dont le bord déchiré prouvait qu’on l’avait, en effet, arrachée à un carnet. Cette feuille portait en tête: «Mars 1869», et en dessous se trouvaient les indications suivantes:

4.

Sherlock Holmes demeura quelque temps assis sans mot dire, la tête penchée en avant, les yeux fixant le feu qui flamboyait, rutilant. Ensuite, il alluma sa pipe et, se renversant dans son fauteuil, considéra les cercles de fumée bleue qui, en se pourchassant, montaient vers le plafond.

– Je crois, Watson, remarqua-t-il enfin, que de toutes les affaires que nous avons eues, aucune n’a jamais été plus fantastique que celle-ci.

– Sauf, peut-être, le Signe des Quatre.

– Oui, sauf peut-être celle-là. Et pourtant ce John Openshaw me semble environné de dangers plus grands encore que ceux que couraient les Sholto.

– Mais êtes-vous arrivé à une idée définie de la nature de ces dangers?

– Il ne saurait y avoir de doute à cet égard.

– Et quels sont-ils? Qui est ce K.K.K. et pourquoi poursuit-il cette malheureuse famille?

Sherlock Holmes ferma les yeux et plaça ses coudes sur le bras de son fauteuil, tout en réunissant les extrémités de ses doigts.

– Le logicien idéal, remarqua-t-il, quand une fois on lui a exposé un fait sous toutes ses faces, en déduirait non seulement toute la chaîne des événements qui ont abouti à ce fait, mais aussi tous les résultats qui s’ensuivraient. De même que Cuvier pouvait décrire exactement un animal tout entier en en examinant un seul os, de même l’observateur qui a parfaitement saisi un seul maillon dans une série d’incidents devrait pouvoir exposer avec précision tous les autres incidents, tant antérieurs que postérieurs. Nous n’avons pas encore bien saisi les résultats auxquels la raison seule est capable d’atteindre. On peut résoudre dans le cabinet des problèmes qui ont mis en défaut tous ceux qui en ont cherché la solution à l’aide de leurs sens. Pourtant, pour porter l’art à son summum, il est nécessaire que le logicien soit capable d’utiliser tous les faits qui sont venus à sa connaissance, et cela implique en soi, comme vous le verrez aisément, une complète maîtrise de toutes les sciences, ce qui, même en ces jours de liberté de l’enseignement et d’encyclopédie, est un avantage assez rare. Il n’est toutefois pas impossible qu’un homme possède la totalité des connaissances qui peuvent lui être utiles dans ses travaux et c’est, quant à moi, ce à quoi je me suis efforcé d’atteindre. Si je me souviens bien, dans une certaine circonstance, aux premiers temps de notre amitié, vous aviez défini mes limites de façon assez précise.

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