Elle administre tout cela pour lui?
PROMÈTHEUSComme je te le dis; et, si tu l'obtiens de lui, tu as tout. Voilà pourquoi je suis venu ici, c'était afin de te le dire; car, de temps immémorial, je suis bienveillant pour les hommes.
PISTHÉTÆROSEn effet, c'est grâce à toi seul, parmi les dieux, que nous faisons des grillades.
PROMÈTHEUSJe hais tous les dieux, comme tu le sais, toi.
PISTHÉTÆROSDe par Zeus! tu as toujours été leur ennemi.
PROMÈTHEUSUn vrai Timôn. Mais comme il faut que je m'en retourne vite, donne-moi l'ombrelle, afin que si Zeus m'aperçoit de là-haut, j'aie l'air d'accompagner une kanéphore.
PISTHÉTÆROSPrends aussi ce siège et emporte-le.
LE CHOEURChez les Skiapodes est un marais, où Sokratès, qui ne se lave jamais, évoque les âmes. Pisandros y vint aussi, demandant à voir son âme, qui l'avait planté là, de son vivant: pour victime, il amenait une chamelle au lieu d'un agneau: il l'égorgea, et s'éloigna comme Odysseus; à ce moment sortit des enfers, pour boire le sang de la chamelle, Khæréphôn, la Chauve-Souris.
POSÉIDÔNLa ville de Néphélokokkygia s'offre à nos regards: nous y venons en députation Holà! toi, que fais-tu? Tu places ton manteau sur la gauche? Tu ne le jettes pas à droite? Quoi donc, malheureux? Tu es du tempérament de Læspodias. O démocratie, à quoi nous as-tu réduits, puisque les dieux ont choisi un pareil représentant?
LE TRIBALLETiens-toi tranquille.
POSÉIDÔNFoin de toi! C'est toi que j'ai vu de beaucoup le plus barbare de tous les dieux. Voyons, que ferons-nous, Hèraklès?
HÈRAKLÈSTu m'as entendu dire que je veux étrangler l'homme qui a ainsi bloqué les dieux.
POSÉIDÔNMais, mon bon, nous avons été choisis comme députés pour négocier.
HÈRAKLÈSJ'ai doublement envie de t'étrangler.
PISTHÉTÆROSDonne-moi la râpe au fromage; apporte du silphion; qu'on apporte du fromage; ranime les charbons.
HÈRAKLÈSHomme, nous sommes trois dieux, ici présents, qui t'adressons nos saluts.
PISTHÉTÆROSJe racle le silphion.
HÈRAKLÈSQuelles sont ces viandes?
PISTHÉTÆROSCelles de quelques oiseaux coupables de soulèvement illégal contre les oiseaux amis du peuple.
HÈRAKLÈSEt tu racles ton silphion avant de nous répondre?
PISTHÉTÆROSAh! salut, Hèraklès. Qu'y a-t-il?
POSÉIDÔNNous venons, envoyés par les dieux, pour négocier au sujet de la guerre.
UN ESCLAVEIl n'y a pas d'huile dans la lékythe.
PISTHÉTÆROSIl faut cependant que les oiseaux soient bien marinés.
HÈRAKLÈSNous, nous ne retirons de la guerre aucun profit; vous, si vous devenez amis de nous autres dieux, vous aurez de l'eau du ciel dans les citernes et vous passerez constamment des jours faits pour les alcyons. C'est pour tout cela que nous venons, munis de pleins pouvoirs.
PISTHÉTÆROSJamais, au grand jamais, nous n'avons commencé la guerre contre vous, et maintenant nous voulons, de bon coeur, si vous voulez aussi faire ce qui est juste, entrer en accommodement. Or voici ce qui est juste: que Zeus rende le sceptre à nous autres oiseaux. Alors les arrangements sont conclus; après quoi, j'invite les envoyés à dîner.
HÈRAKLÈSPour moi, cela me suffit, et j'y consens.
POSÉIDÔNComment, malheureux? Tu es un niais et un goinfre: tu dépouilles ton père de sa toute-puissance.
PISTHÉTÆROSVraiment? Mais vous, les dieux, ne serez-vous pas plus forts si les oiseaux règnent ici-bas? Aujourd'hui, cachés sous les nuages, les mortels échappent à vos yeux et parjurent votre nom. Quand vous aurez les oiseaux pour alliés, si quelqu'un jure par le corbeau et par Zeus, le corbeau volera furtivement sur le parjure et lui crèvera l'oeil à coups de bec.
POSÉIDÔNPar Poséidôn! voilà qui est bien dit.
HÈRAKLÈSC'est aussi mon avis.
PISTHÉTÆROS, au TriballeEt toi, que t'en semble?
LE TRIBALLENabaisatreu.
PISTHÉTÆROSVois-tu? Il approuve aussi. Écoutez encore un autre bien que nous vous ferons. Si un homme, après avoir voué un sacrifice à quelque dieu, s'y soustrait en disant: «Les dieux peuvent attendre,» et s'y refuse par avarice, nous punirons également cette conduite.
POSÉIDÔNVoyons, de quelle manière?
PISTHÉTÆROSLorsque cet homme sera à compter son argent, ou assis dans un bain, un milan fondra lui dérober en secret le prix de deux brebis, et le portera au dieu.
HÈRAKLÈSJe vote encore pour que le sceptre leur soit rendu.
POSÉIDÔNDemande maintenant au Triballe.
HÈRAKLÈSTriballe, es-tu d'avis de gémir?
LE TRIBALLESaunaka Baktarikrousa.
HÈRAKLÈSIl dit que c'est très bien parler.
POSÉIDÔNSi c'est là votre avis à tous deux, c'est aussi le mien.
HÈRAKLÈSEh bien! nous sommes d'accord pour ce qui est du sceptre.
PISTHÉTÆROSEt, de par Zeus! il y a une autre condition, dont je me souviens, moi; je laisse Hèra à Zeus, mais il faut qu'on me donne pour femme la jeune Basiléia.
POSÉIDÔNTu n'as pas envie de faire la paix. Retournons chez nous.
PISTHÉTÆROSJe n'en ai cure. Cuisinier, il faut nous faire un bon coulis.
HÈRAKLÈSÊtre singulier, Poséidôn, où vas-vu? Ferons-nous la guerre pour une femme?
POSÉIDÔNQue devons-nous faire?
HÈRAKLÈSQuoi? Négocions.
POSÉIDÔNHé, malheureux! ne vois-tu pas qu'on te trompe depuis longtemps? Tu te ruines toi-même. Car si Zeus meurt, après leur avoir donné l'empire, te voilà dans la pauvreté: c'est à toi que sont tous les biens que Zeus laisserait en mourant.
PISTHÉTÆROSO malheur! Comme on t'en fait accroire! Viens ici à l'écart, que je te parle. Ton oncle te trompe, pauvre garçon. Des biens paternels il ne te revient pas une obole: c'est la loi: tu es bâtard et non fils légitime.
HÈRAKLÈSMoi bâtard? Que dis-tu?
PISTHÉTÆROSSans doute, de par Zeus! puisque tu es né d'une femme étrangère. Et comment crois-tu qu'Athèna fût son héritière, elle sa fille, si elle avait des frères légitimes?
HÈRAKLÈSMais si mon père voulait me donner ses biens en mourant, à moi bâtard?
PISTHÉTÆROSLa loi ne le lui permet pas. Et ce Poséidôn même, qui t'excite maintenant, serait le premier à te disputer l'héritage des biens paternels, en disant qu'il est frère légitime. Je vais te dire la loi de Solôn: «Le bâtard est exclu de la succession, s'il y a des enfants légitimes, et, s'il n'y a pas d'enfants légitimes, les biens passent aux plus proches parents.»
HÈRAKLÈSEt moi je n'ai rien de la fortune paternelle?
PISTHÉTÆROSRien, de par Zeus! Mais, dis-moi, ton père t'a-t-il fait inscrire sur le registre de ta phratrie?