Шодерло де Лакло Пьер - Опасные связи / Les liaisons dangereuses. Книга для чтения на французском языке стр 6.

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Dans la vie sage et retirée que vous menez, ces scandaleuses aventures ne parviennent pas jusquà vous. Je pourrais vous en raconter qui vous feraient frémir ; mais vos regards, purs comme votre âme, seraient souillés par de semblables tableaux : sûre que Valmont ne sera jamais dangereux pour vous, vous navez pas besoin de pareilles armes pour vous défendre. La seule chose que jai à vous dire, cest que de toutes les femmes auxquelles il a rendu des soins, succès ou non, il nen est point qui naient eu à sen plaindre. La seule Marquise de Merteuil fait exception à cette règle générale ; seule elle a su lui résister et enchaîner sa méchanceté. Javoue que ce trait de sa vie est celui qui lui fait le plus dhonneur à mes yeux : aussi a-t-il suffi pour la justifier pleinement aux yeux de tous, de quelques inconséquences quon avait à lui reprocher dans le début de son veuvage[9].

Quoi quil en soit, ma belle amie, ce que lâge, lexpérience, et surtout lamitié, mautorisent à vous représenter, cest quon commence à sapercevoir dans le monde de labsence de Valmont ; et que si on sait quil soit resté quelque temps en tiers entre sa tante et vous, votre réputation sera entre ses mains ; malheur le plus grand qui puisse arriver à une femme. Je vous conseille donc dengager sa tante à ne pas le retenir davantage ; et sil sobstine à rester, je crois que vous ne devez pas hésiter à lui céder la place. Mais pourquoi resterait-il ? que fait-il donc à cette campagne ? Si vous faisiez épier ses démarches, je suis sûre que vous découvririez quil na fait que prendre un asile plus commode, pour quelques noirceurs quil médite dans les environs. Mais, dans limpossibilité de remédier au mal, contentons-nous de nous en garantir.

Adieu, ma belle amie ; voilà le mariage de ma fille un peu retardé. Le Comte de Gercourt, que nous attendions dun jour à lautre, me mande que son régiment passe en Corse ; et comme il y a encore des mouvements de guerre, il lui sera impossible de sabsenter avant lhiver. Cela me contrarie ; mais cela me fait espérer que nous aurons le plaisir de vous voir à la noce, et jétais fâchée quelle se fît sans vous. Adieu ; je suis, sans compliment comme sans réserve, entièrement à vous.

P. S. Rappelez-moi au souvenir de Mme de Rosemonde, que jaime toujours autant quelle le mérite.

De, ce 11 août 17**.

Lettre X. La Marquise de Merteuil au Vicomte de Valmont

Me boudez-vous, Vicomte ? ou bien êtes-vous mort ? ou, ce qui y ressemblerait beaucoup, ne vivez-vous plus que pour votre Présidente ? Cette femme, qui vous a rendu les illusions de la jeunesse, vous en rendra bientôt aussi les ridicules préjugés. Déjà vous voilà timide et esclave ; autant vaudrait être amoureux. Vous renoncez à vos heureuses témérités. Vous voilà donc vous conduisant sans principes et donnant tout au hasard, ou plutôt au caprice. Ne vous souvient-il plus que lamour est, comme la médecine, seulement lart daider à la nature ? Vous voyez que je vous bats avec vos armes ; mais je nen prendrai pas dorgueil ; car cest bien battre un homme à terre. Il faut quelle se donne, me dites-vous : eh ! sans doute, il le faut ; aussi se donnera-t-elle comme les autres, avec cette différence que ce sera de mauvaise grâce. Mais, pour quelle finisse par se donner, le vrai moyen est de commencer par la prendre. Que cette ridicule distinction est bien un vrai déraisonnement de lamour ! Je dis lamour ; car vous êtes amoureux. Vous parler autrement, ce serait vous trahir ; ce serait vous cacher votre mal. Dites-moi donc, amant langoureux, ces femmes que vous avez eues ; croyez-vous les avoir violées ? Mais, quelque envie quon ait de se donner, quelque pressée que lon en soit, encore faut-il un prétexte ; et y en a-t-il de plus commode pour nous, que celui qui nous donne lair de céder à la force ? Pour moi, je lavoue, une des choses qui me flattent le plus, est une attaque vive et bien faite, où tout se succède avec ordre, quoique avec rapidité ; qui ne nous met jamais dans ce pénible embarras de réparer nous-mêmes une gaucherie dont au contraire nous aurions dû profiter ; qui sait garder lair de la violence jusque dans les choses que nous accordons, et flatter avec adresse nos deux passions favorites, la gloire de la défense et le plaisir de la défaite. Je conviens que ce talent, plus rare que lon ne croit, ma toujours fait plaisir, même alors quil ne ma pas séduite, et que quelquefois il mest arrivé de me rendre, uniquement comme récompense. Telle, dans nos anciens tournois, la beauté donnait le prix de la valeur et de ladresse.

Mais vous, vous qui nêtes plus vous, vous vous conduisez comme si vous aviez peur de réussir. Eh ! depuis quand voyagez-vous à petites journées et par des chemins de traverse ? Mon ami, quand on veut arriver, des chevaux de poste et la grande route ! Mais laissons ce sujet qui me donne dautant plus dhumeur quil me prive du plaisir de vous voir. Au moins écrivez-moi plus souvent que vous ne faites, et mettez-moi au courant de vos progrès. Savez-vous que voilà plus de quinze jours que cette ridicule aventure vous occupe, et que vous négligez tout le monde.

À propos de négligence, vous ressemblez aux gens qui envoient régulièrement savoir des nouvelles de leurs amis malades, mais qui ne se font jamais rendre la réponse. Vous finissez votre dernière lettre par me demander si le Chevalier est mort. Je ne réponds pas, et vous ne vous en inquiétez pas davantage. Ne savez-vous plus que mon amant est votre ami-né ? Mais rassurez-vous, il nest point mort ; ou sil létait, ce serait de lexcès de sa joie. Ce pauvre Chevalier, comme il est tendre ! comme il est fait pour lamour ! comme il sait sentir vivement ! la tête men tourne. Sérieusement, le bonheur parfait quil trouve à être aimé de moi, mattache véritablement à lui.

Ce même jour, où je vous écrivais que jallais travailler à notre rupture, combien je le rendis heureux ! Je moccupais pourtant tout de bon des moyens de le désespérer, quand on me lannonça. Soit caprice ou raison, jamais il ne me parut si bien. Je le reçus cependant avec humeur. Il espérait passer deux heures avec moi, avant celle où ma porte serait ouverte à tout le monde. Je lui dis que jallais sortir : il me demanda où jallais ; je refusai de le lui apprendre. Il insista : Où vous ne serez pas, repris-je avec aigreur. Heureusement pour lui, il resta pétrifié de cette réponse ; car sil eût dit un mot, il sensuivait immanquablement une scène qui eût amené la rupture que javais projetée. Étonnée de son silence, je jetai les yeux sur lui, sans autre projet, je vous jure, que de voir la mine quil faisait. Je retrouvai sur cette charmante figure cette même tristesse à la fois profonde et tendre à laquelle vous-même êtes convenu quil était si difficile de résister. La même cause produisit le même effet ; je fus vaincue une seconde fois. Dès ce moment, je ne moccupai plus que des moyens déviter quil pût me trouver un tort. « Je sors pour affaire, lui dis-je avec un air un peu plus doux, et même cette affaire vous regarde ; mais ne minterrogez pas. Je souperai chez moi, revenez, et vous serez instruit. » Alors il retrouva la parole ; mais je ne lui permis pas den faire usage. « Je suis très pressée, continuai-je : laissez-moi ; à ce soir. » Il baisa ma main et sortit.

Aussitôt, pour le dédommager, peut-être aussi pour me dédommager moi-même, je me décide à lui faire connaître ma petite maison dont il ne se doutait pas. Jappelle ma fidèle Victoire. Jai ma migraine ; je me couche pour tous mes gens ; et, restée enfin seule avec la véritable, tandis quelle se travestit en laquais, je fais une toilette de femme de chambre. Elle fait ensuite venir un fiacre à la porte de mon jardin, et nous voilà parties. Arrivée dans ce temple de lamour, je choisis le déshabillé le plus galant. Celui-ci est délicieux, il est de mon invention : il ne laisse rien voir, et pourtant fait tout deviner. Je vous en promets un modèle pour votre Présidente, quand vous laurez rendue digne de le porter.

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