Шодерло де Лакло Пьер - Опасные связи / Les liaisons dangereuses. Книга для чтения на французском языке стр 9.

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À présent, ma chère amie, si je suis bien aise, je suis aussi bien embarrassée ; car sûrement il ne faut pas que je réponde à cette lettre-là. Je sais bien que ça ne se doit pas, et pourtant il me le demande ; et, si je ne réponds pas, je suis sûre quil va encore être triste. Cest pourtant bien malheureux pour lui ! Quest-ce que tu me conseilles ? mais tu nen sais pas plus que moi. Jai bien envie den parler à Mme de Merteuil qui maime bien. Je voudrais bien le consoler ; mais je ne voudrais rien faire qui fût mal. On nous recommande tant davoir bon cœur ! et puis on nous défend de suivre ce quil nous inspire, quand cest pour un homme. Dame ! Ça nest pas juste non plus. Est-ce quun homme nest pas notre prochain comme une femme, et plus encore ? car enfin na-t-on pas son père comme sa mère, son frère comme sa sœur ? il reste toujours le mari de plus. Cependant, si jallais faire quelque chose qui ne fût pas bien, peut-être que M. Danceny lui-même naurait plus bonne idée de moi ! Oh ! ça, par exemple, jaime encore mieux quil soit triste . Et puis, enfin, je serai toujours à temps. Parce quil a écrit hier, je ne suis pas obligée décrire aujourdhui : aussi bien je verrai Mme de Merteuil ce soir, et si jen ai le courage, je lui conterai tout. En ne faisant que ce quelle me dira, je naurai rien à me reprocher. Et puis peut-être me dira-t-elle que je peux lui répondre un peu, pour quil ne soit plus si triste ! Oh ! je suis bien en peine.

Adieu, ma bonne amie. Dis-moi toujours ce que tu penses.

De, ce 19 août 17**.

Lettre XVII. Le Chevalier Danceny à Cécile Volanges

Avant de me livrer, Mademoiselle, dirai-je au plaisir ou au besoin de vous écrire ? je commence par vous supplier de mentendre. Je sens que pour oser vous déclarer mes sentiments, jai besoin dindulgence ; si je ne voulais que les justifier, elle me serait inutile. Que vais-je faire, après tout, que vous montrer votre ouvrage ? Et quai-je à vous dire, que mes regards, mon embarras, ma conduite et même mon silence, ne vous aient dit avant moi ? Eh ! pourquoi vous fâcheriez-vous dun sentiment que vous avez fait naître ? Emané de vous, sans doute il est digne de vous être offert ; sil est brûlant comme mon âme, il est pur comme la vôtre. Serait-ce un crime davoir su apprécier votre charmante figure, vos talents séducteurs, vos grâces enchanteresses, et cette touchante candeur qui ajoute un prix inestimable à des qualités déjà si précieuses ? non, sans doute ; mais, sans être coupable, on peut être malheureux ; et cest le sort qui mattend, si vous refusez dagréer mon hommage. Cest le premier que mon cœur ait offert. Sans vous je serais encore, non pas heureux, mais tranquille. Je vous ai vue ; le repos a fui loin de moi, et mon bonheur est incertain. Cependant vous vous étonnez de ma tristesse ; vous men demandez la cause : quelquefois même jai cru voir quelle vous affligeait. Ah ! dites un mot, et ma félicité deviendra votre ouvrage. Mais, avant de prononcer, songez quun mot peut aussi combler mon malheur. Soyez donc larbitre de ma destinée. Par vous je vais être éternellement heureux ou malheureux. En quelles mains plus chères puis-je remettre un intérêt plus grand ?

Je finirai, comme jai commencé, par implorer votre indulgence. Je vous ai demandé de mentendre ; joserai plus ; je vous prierai de me répondre. Le refuser, serait me laisser croire que vous vous trouvez offensée, et mon cœur mest garant que mon respect pour vous égale mon amour.

P. S. Vous pouvez vous servir, pour me répondre, du même moyen dont je me sers pour vous faire parvenir cette lettre ; il me parait également sûr et commode.

De, ce 18 août 17**.

Lettre XVIII. Cécile Volanges à Sophie Carnay

Quoi ! Sophie, tu blâmes davance ce que je vais faire ! Javais déjà bien assez dinquiétudes ; voilà que tu les augmentes encore. Il est clair, dis-tu, que je ne dois pas répondre. Tu en parles bien à ton aise ; et dailleurs, tu ne sais pas au juste ce qui en est : tu nes pas là pour voir. Je suis sûre que si tu étais à ma place, tu ferais comme moi. Sûrement en général on ne doit pas répondre et tu as bien vu, par ma lettre dhier, que je ne le voulais pas non plus : mais cest que je ne crois pas que personne se soit jamais trouvé dans le cas où je suis.

Et encore être obligée de me décider toute seule ! Mme de Merteuil, que je comptais voir hier au soir, nest pas venue. Tout sarrange contre moi : cest elle qui est cause que je le connais. Cest presque toujours avec elle que je lai vu, que je lui ai parlé. Ce nest pas que je lui en veuille du mal : mais elle me laisse là au moment de lembarras. Oh ! je suis bien à plaindre !

Figure-toi quil est venu hier comme à lordinaire. Jétais si troublée, que je nosais le regarder. Il ne pouvait pas me parler, parce que Maman était là. Je me doutais bien quil serait fâché, quand il verrait que je ne lui avais pas écrit. Je ne savais quelle contenance faire. Un petit moment après il me demanda si je voulais quil allât chercher ma harpe. Le cœur me battait si fort, que ce fut tout ce que je pus faire que de répondre que oui. Quand il revint, cétait bien pis. Je ne le regardai quun petit moment. Il ne me regardait pas, lui : mais il avait un air, quon aurait dit quil était malade. Ça me faisait bien de la peine. Il se mit à accorder ma harpe, et après, en me lapportant, il me dit : « Ah ! Mademoiselle ! » Il ne me dit que ces deux mots-là ; mais cétait dun ton que jen fus toute bouleversée. Je préludais sur ma harpe, sans savoir ce que je faisais. Maman demanda si nous ne chanterions pas. Lui sexcusa, en disant quil était un peu malade ; et moi, qui navais pas dexcuse, il me fallut chanter. Jaurais voulu navoir jamais eu de voix. Je choisis exprès un air que je ne savais pas ; car jétais bien sûre que je ne pourrais en chanter aucun, et on se serait aperçu de quelque chose. Heureusement il vint une visite ; et, dès que jentendis entrer un carrosse, je cessai, et le priai de rapporter ma harpe. Javais bien peur quil ne sen allât en même temps ; mais il revint.

Pendant que Maman et cette dame qui était venue causaient ensemble, je voulus le regarder encore un petit moment. Je rencontrai ses yeux, et il me fut impossible de détourner les miens. Un moment après je vis ses larmes couler, et il fut obligé de se retourner pour nêtre pas vu. Pour le coup, je ne pus plus y tenir ; je sentis que jallais pleurer aussi. Je sortis, et tout de suite jécrivis avec mon crayon, sur un chiffon de papier : « Ne soyez donc pas si triste, je vous en prie ; je promets de vous répondre. » Sûrement tu ne peux pas dire quil y ait du mal à cela ; et puis cétait plus fort que moi. Je mis mon papier aux cordes de ma harpe, comme sa lettre était, et je revins dans le salon. Je me sentais plus tranquille. Il me tardait bien que cette dame sen fût. Heureusement, elle était en visite ; elle sen alla bientôt après. Aussitôt quelle fut sortie, je dis que je voulais reprendre ma leçon de harpe, et je le priai de laller chercher. Je vis bien, à son air, quil ne se doutait de rien. Mais au retour, oh ! comme il était content ! En posant ma harpe vis-à-vis de moi, il se plaça de façon que Maman ne pouvait voir, et il prit ma main quil serra mais dune façon ! ce ne fut quun moment : mais je ne saurais te dire le plaisir que cela ma fait. Je la retirai pourtant ; ainsi je nai rien à me reprocher.

À présent, ma bonne amie, tu vois bien que je ne peux pas me dispenser de lui écrire, puisque je le lui ai promis ; et puis, je nirai pas lui refaire encore du chagrin ; car jen souffre plus que lui. Si cétait pour quelque chose de mal, sûrement je ne le ferais pas. Mais quel mal peut-il y avoir à écrire, surtout quand cest pour empêcher quelquun dêtre malheureux ? Ce qui membarrasse, cest que je ne saurai pas bien faire ma lettre ; mais il sentira bien que ce nest pas ma faute ; et puis je suis sûre que rien que de ce quelle sera de moi, elle lui fera toujours plaisir.

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