Camille Flammarion - Uranie стр 3.

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Mais nous nous étions approchés, comme je lai dit, de lun des mondes appartenant au système du soleil saphir. Tout était bleu, paysages, eaux, plantes, rochers, légèrement verdis du côté éclairé par le second soleil, et à peine touchés des rayons du soleil orange qui se levait à lhorizon lointain. A mesure que nous pénétrions dans latmosphère de ce monde, une musique suave et délicieuse sélevait dans les airs, comme un parfum, comme un rêve. Je navais jamais rien entendu de pareil. La douce mélodie, profonde, lointaine, semblait venir dun chœur de harpes et de violons soutenu par un accompagnement dorgues. Cétait un chant exquis, qui charmait dès le premier instant, qui navait pas besoin dêtre analysé pour être compris, et qui remplissait lâme de volupté. Il me semblait que je serais resté une éternité à lécouter: je nosais adresser la parole à mon guide, tant je craignais den perdre une note. Uranie sen aperçut. Elle étendit la main vers un lac et me désigna du doigt un groupe dêtres ailés qui planaient au-dessus des eaux bleues.

Ils navaient point la forme humaine terrestre. Cétaient des êtres évidemment organisés pour vivre dans lair. Ils semblaient tissés de lumière. De loin, je les pris dabord pour des libellules: ils en avaient la forme svelte et élégante, les vastes ailes, la vivacité, la légèreté. Mais en les examinant de plus près, je maperçus de leur taille, qui nétait pas inférieure à la nôtre, et je reconnus à lexpression de leurs regards que ce nétaient point des animaux. Leurs têtes ressemblaient également à celles des libellules, et, comme ces êtres aériens, ils navaient pas de jambes. La musique si délicieuse que jentendais nétait autre que le bruit de leur vol. Ils étaient très nombreux, plusieurs milliers peut-être.

On voyait, sur les sommets des montagnes, des plantes qui nétaient ni des arbres ni des fleurs, qui élevaient de frêles tiges à dénormes hauteurs, et ces tiges ramifiées portaient, comme en tendant les bras, de larges coupes en forme de tulipes. Ces plantes étaient animées; du moins, comme nos sensitives et plus encore, et comme la desmodie aux feuilles mobiles, elles manifestaient par des mouvements leurs impressions intérieures. Ces bosquets formaient de véritables cités végétales. Les habitants de ce monde navaient pas dautres demeures que ces bosquets, et cest au milieu de ces sensitives parfumées quils se reposaient lorsquils ne flottaient pas dans les airs.

«Ce monde te paraît fantastique, fit Uranie, et tu te demandes quelles idées peuvent avoir ces êtres, quelles mœurs, quelle histoire, quelles espèces darts, de littérature et de sciences. Il serait long de répondre à toutes les questions que tu pourrais faire. Sache seulement que leurs yeux sont supérieurs à vos meilleurs télescopes, que leur système nerveux vibre au passage dune comète et découvre électriquement des faits que vous ne connaîtrez jamais sur la Terre. Les organes que tu vois au-dessous des ailes leur servent de mains plus habiles que les vôtres. Pour imprimerie, ils ont la photographie directe des événements et la fixation phonétique des paroles mêmes. Ils ne soccupent, du reste, que de recherches scientifiques, cest-à-dire de létude de la nature. Les trois passions qui absorbent la plus grande partie de la vie terrestre, lâpre désir de la fortune, lambition politique et lamour, leur sont inconnues, parce quils nont besoin de rien pour vivre, parce quil ny a pas de divisions internationales ni dautre gouvernement quun conseil dadministration, et parce quils sont androgynes.

 Androgynes! répliquai-je. Et josai ajouter: Est-ce mieux?

 Cest autre. Ce sont de grands troubles de moins dans une humanité.

«Il faut, continua-t-elle, se dégager entièrement des sensations et des idées terrestres pour être en situation de comprendre la diversité infinie manifestée par les différentes formes de la création. De même que sur votre planète les espèces ont changé dâge en âge, depuis les êtres si bizarres des premières époques géologiques jusquà lapparition de lhumanité, de même que maintenant encore la population animale et végétale de la Terre est composée des formes les plus diverses, depuis lhomme jusquau corail, depuis loiseau jusquau poisson, depuis léléphant jusquau papillon; de même, et sur une étendue incomparablement plus vaste, parmi les innombrables terres du ciel, les forces de la nature ont donné naissance à une diversité infinie dêtres et de choses. La forme des êtres est, en chaque monde, le résultat des éléments spéciaux à chaque globe, substances, chaleur, lumière, électricité, densité, pesanteur.

Les formes, les organes, le nombre des sens vous nen avez que cinq, et ils sont assez pauvres dépendent des conditions vitales de chaque sphère. La vie est terrestre sur la Terre, martienne sur Mars, saturnienne sur Saturne, neptunienne sur Neptune, cest-à-dire appropriée à chaque séjour, ou pour mieux dire, plus rigoureusement encore, produite et développée par chaque monde selon son état organique et suivant une loi primordiale à laquelle obéit la nature entière: la loi du Progrès.»

Pendant quelle me parlait, javais suivi du regard le vol des êtres aériens vers la cité fleurie et javais vu avec stupéfaction les plantes se mouvoir, sélever ou sabaisser pour les recevoir; le soleil vert était descendu au-dessous de lhorizon et le soleil orange sétait élevé dans le ciel; le paysage était décoré dune coloration féerique sur laquelle planait une lune énorme, mi-partie orangée et mi-partie verte. Alors limmense mélodie qui remplissait latmosphère sarrêta, et au milieu dun profond silence jentendis un chant, sélevant dune voix si pure que nulle voix humaine ne pourrait lui être comparée.

«Quel merveilleux système, mécriai-je, quun tel monde illuminé par de tels flambeaux! Ce sont donc là les étoiles doubles, triples, multiples, vues de près.

 Splendides soleils que ces étoiles! répondit la déesse. Gracieusement associées dans les liens dune attraction mutuelle, vous les voyez de la Terre, bercées deux à deux au sein des cieux, toujours belles, toujours lumineuses, toujours pures. Suspendues dans linfini, elles sappuient lune sur lautre sans jamais se toucher, comme si leur union, plus morale que matérielle, était régie par un principe invisible et supérieur, et suivant des courbes harmonieuses, elles gravitent en cadence lune autour de lautre, couples célestes éclos au printemps de la création dans les campagnes constellées de limmensité. Tandis que les soleils simples comme le vôtre brillent solitaires, fixes, tranquilles, dans les déserts de lespace, les soleils doubles et multiples semblent animer par leurs mouvements, leur coloration et leur vie, les régions silencieuses du vide éternel. Ces horloges sidérales marquent pour vous les siècles et les ères des autres univers.

«Mais, ajouta-t-elle, continuons notre voyage. Nous ne sommes quà quelques trillions de lieues de la Terre.

 Quelques trillions?

 Oui. Si nous pouvions entendre dici les bruits de votre planète, ses volcans, ses canonnades, ses tonnerres, ou les vociférations des grandes foules les jours de révolution, ou les chants pieux des églises qui sélèvent vers le Ciel, la distance est telle quen admettant que ces bruits puissent la franchir avec la vitesse du son dans lair, ils nemploieraient pas moins de quinze millions dannées pour arriver jusquici. Nous entendrions aujourdhui seulement ce qui se passait sur la Terre il y a quinze millions dannées.

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